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Agriculture : Les lignes de crĂȘtes du prochain ministre.


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La crise agricole du dĂ©but d’annĂ©e avait transformĂ© l’agriculture française en vĂ©ritable cocotte-minute. AprĂšs plusieurs semaines de manifs les promesses gouvernementales avaient un peu rĂ©duit la pression. Le sĂ©isme politique de juin-juillet dont les rĂ©pliques sont toujours intenses laisse planer un grand doute sur l’avenir de ces engagements et du projet avortĂ© de loi agricole. La pression risque donc de vite remonter dans la cocotte, et la feuille de route du ministre ressembler Ă  chemin de crĂȘte par gros temps.

 

La conjoncture rend la ligne de crĂȘte de la rentrĂ©e pĂ©rilleuse.

 

AprĂšs trois annĂ©es globalement satisfaisantes, la campagne 2023/2024 s’annonce dĂ©cevante avec une rĂ©colte de cultures d’hiver mauvaise. Ce qui va attiser le spectre du soutien au revenu. Le ministre devra naviguer entre des aides d’urgence demandĂ©es par les syndicats et le risque de dĂ©crĂ©dibiliser le nouveau systĂšme d’assurance rĂ©colte (Ă  peine un tiers des surfaces cultivĂ©es sont assurĂ©es).

 

Plusieurs crises sanitaires sont en cours ou Ă  nos portes et inquiĂštent les Ă©leveurs. Elles demandent coordination et anticipation (grippe aviaire, maladie hĂ©morragique Ă©pizootique des bovins, fiĂšvre catarrhale ovine, peste porcine africaine, rĂ©surgence de tuberculose bovine 
). La ligne de crĂȘte est tĂ©nue entre action publique et dĂ©ploiement de la vaccination par le secteur libĂ©ral, entre protection vaccinale des animaux et capacitĂ© Ă  exporter


Le sentier sera d’autant plus Ă©troit que le feu de la crise de dĂ©but d’annĂ©e couve encore et que les syndicats sont en campagne Ă©lectorale pour les Ă©lections aux chambres d’agriculture en janvier prochain.

 

Le chemin de crĂȘte risque d’ĂȘtre long et accidenté 

 

Plusieurs gros dossiers structurants, essentiels pour l’avenir de l’agriculture, restent sur la table du ministre, certains, comme le foncier, ont mĂȘme Ă©tĂ© glissĂ©s sous le tapis. Un passage en force est de plus en plus inconcevable. La conjoncture politique poussera certainement, enfin, Ă  rĂ©duire le pĂ©rimĂštre lĂ©gislatif au strict nĂ©cessaire. Le ministre sera sans doute peu tentĂ© de proposer une nouvelle loi « fourre-tout » issue d’arbitrages de plus en plus incertains avec le parlement.

 

Les domaines concernés sont nombreux, citons en quelques-uns :

  • NĂ©gociation commerciale, saurons-nous avancer concrĂštement sans loi Egalim de plus.

  • La gestion du stockage et de l’utilisation de l’eau.

  • Le pilotage de la rĂ©duction des produits de santĂ© des plantes.

  • Le dĂ©veloppement de l’agroĂ©cologie et l’amĂ©lioration de notre systĂšme d’accompagnement des agriculteurs (sujet tabou mais point de blocage important aujourd’hui).

  • La question fonciĂšre qui, elle, demande nĂ©cessairement, une Ă©volution lĂ©gislative.

 

On peut espérer que les différentes parties prenantes, plutÎt que de réclamer systématiquement une loi pour chaque sujet, rechercheront par la coopération, les discussions à développer des accords contractuels.

 

Rester sur le chemin de crĂȘte demande vision et audace

 

L’instabilitĂ©, l’imprĂ©visibilitĂ© croissante du contexte conditionnent Ă©videmment le parcours du ministre en l’entourant parfois d’un Ă©pais brouillard. Mais trois tendances lourdes s’inscrivent dans la durĂ©e et exigent de ne pas se tromper de cap ou de trajectoire.

 

L’évolution de la consommation est un Ă©lĂ©ment central pour les marchĂ©s et les dĂ©bouchĂ©s de l’agriculture française. Quatre macro- tendances ne doivent pas ĂȘtre occultĂ©es : une baisse globale de la consommation alimentaire (sans doute pour des raisons dĂ©mographiques), une baisse des achats en GMS et une progression de la RHD, une diminution de la consommation individuelle de viande, un nombre croissant de familles ayant un problĂšme de pouvoir d’achat alimentaire.

 

La compĂ©titivitĂ© est, dans un marchĂ© ouvert, indispensable pour la pĂ©rennitĂ© d’une agriculture qui exporte un tiers de sa production. Nous avons de ce point de vue des atouts mais aussi de grosses faiblesses notamment au niveau intra-europĂ©en qu’il convient d’analyser. Cette Ă©vidence doit rester un fil rouge dans la conduite de l’action publique.

 

Notre engagement europĂ©en est une dimension essentielle de notre politique agricole. De ce point de vue la ligne d’horizon de la neutralitĂ© carbone en 2050 nous oblige dans le choix de nos actions agricoles notamment dans le cadre du pacte vert. Enfin le futur ministre aura Ă  engager la nĂ©gociation sur la prochaine rĂ©forme de la politique agricole commune dans un contexte inĂ©dit de guerre Ă  nos frontiĂšres, de perspective d’adhĂ©sion de l’Ukraine et de choix gĂ©ostratĂ©gique demandant sans doute un rĂ©armement agricole europĂ©en compatible avec le pacte vert.

 

 

La feuille de route du prochain ministre de l’agriculture, ressemblera donc bien davantage Ă  une ligne de crĂȘte, (peut-ĂȘtre mĂȘme parfois minĂ©e) qu’à un parcours balisĂ©. Pour fixer un cap clair et ne pas dĂ©visser de la crĂȘte ou rester bloquer au refuge, des compĂ©tences agricoles et un capital confiance auprĂšs des leaders agricoles seront Ă©videmment bienvenues dans le temps politique nouveau qui s’ouvre.

 

Jean-Marie Séronie

Agroéconomiste indépendant

Membre de l’AcadĂ©mie d’agriculture

 
 
 
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